10 Oct

Plusieurs facteurs peuvent influencer la réponse immunitaire induite par la vaccination. La nature et l’intensité de la réponse varieront en fonction de facteurs liés au vaccin et de facteurs liés à l’hôte.

Facteurs liés au vaccin

Nature de l’antigène

VACCINS VIVANTS ATTÉNUÉS

Les particules virales se disséminent rapidement dans l’organisme, se multiplient et activent l’immunité innée puis l’immunité adaptative, comme lors de l’infection naturelle.Les réactions inflammatoires locales sont rares et sont liées plus au volume injecté qu’à la composition du vaccin.L’infection est habituellement non apparente. Elle peut être accompagnée de symptômes systémiques atténués (ex. : fièvre, malaises, éruption) après la période nécessaire à la réplication virale (de 7 à 21 jours selon le vaccin).Le temps nécessaire à l’induction d’anticorps (de 2 à 3 semaines) reflète la durée de différenciation des lymphocytes B dans la rate et les ganglions.Comparativement aux vaccins inactivés, les vaccins vivants atténués induisent une meilleure réponse immunitaire innée, une production d’anticorps plus importante et plus persistante en raison de la réplication systémique. La conséquence est l’obtention d’un taux d’anticorps plus élevé et plus durable.

RÉPONSE IMMUNITAIRE HUMORALE PROVOQUÉE PAR LA ROUGEOLE NATURELLE ET PAR LE VACCIN CONTRE LA ROUGEOLE

Adapté de Michel REY, Vaccinations
VACCINS INACTIVÉS

La réponse immunitaire est variable selon les antigènes des vaccins.Les Ag vaccinaux sont pris en charge par les cellules dendritiques. Celles-ci provoquent l’activation des cellules inflammatoires et déclenchent la réaction locale. Les cellules dendritiques migrent également vers les ganglions régionaux et peuvent y déclencher de l’inflammation. Cette période dure de 2 à 3 semaines, produisant un pic d’anticorps environ 1 mois après la vaccination.Les plasmocytes responsables de cette réponse immunitaire primaire meurent rapidement par la suite, entraînant une baisse rapide du taux d’anticorps, d’où la nécessité d’administrer 1 ou plusieurs doses additionnelles, qui entraîneront une réponse anamnestique secondaire.On distingue plusieurs types de vaccins inactivés :

  • Inactivés polysaccharidiques;
  • Inactivés polysaccharidiques conjugués à une protéine;
  • Inactivés entiers ou inactivés à protéines purifiées;
  • Inactivés à ARN messager;
  • Inactivés à protéines recombinantes;
  • Inactivés à vecteur viral.
Caractéristiques des vaccins inactivés
Type de vaccinCaractéristiques
Vaccins entiers ou à protéines purifiéesLes vaccins inactivés entiers sont constitués de micro‑organismes complets, alors que les vaccins inactivés à protéines purifiées contiennent des protéines constituantes des micro-organismesLa présence de protéines rend les substances immunogènes et induit une réponse immunitaire humorale (lymphocytes B) et cellulaire (lymphocytes T)Les antigènes sont dits T‑dépendantsCes vaccins sont immunogènes avant l’âge de 2 ansLa production de cellules mémoire permet une réponse anamnestique lors d’une nouvelle exposition à ces vaccins
Vaccins polysaccharides conjugués à une protéineLa conjugaison est le couplage des polysaccharides à une protéine vectriceLa réponse immunitaire est apparentée à celle des vaccins inactivés entiers ou inactivés à protéines purifiées et elle possède les mêmes caractéristiquesLa réponse immunitaire induite est humorale (lymphocytes B) et cellulaire (lymphocytes T)Les principales protéines utilisées pour la conjugaison dans la fabrication des vaccins contre le pneumocoque et le méningocoque sont :
  • anatoxine diphtérique;
  • anatoxine tétanique;
  • variante non toxique de la toxine diphtérique (CRM197);
  • protéine OMV provenant de la capsule de Neisseria meningitidis
Vaccins polysaccharidiquesLes polysaccharides sont des constituants de la membrane externe de la bactérieLa réponse immunitaire induite est humorale seulement (lymphocytes B)Les lymphocytes T ne sont pas stimulésLes antigènes sont dits T‑indépendantsCes vaccins sont peu ou pas immunogènes avant l’âge de 2 ansIl n’y a pas de production de cellules mémoire et de réponse anamnestique à la suite d’une nouvelle exposition à ces vaccins
Vaccins à ARN messagerUn vaccin à ARN messager est constitué de nanoparticules lipidiques contenant de l’ARN messager. Cet ARN messager contient un fragment de l’information génétique du virusLe vaccin à ARN messager est absorbé par les cellules. Dans le cytoplasme de la cellule, il permet de fabriquer une protéine virale qui va stimuler le système immunitaireLa réponse immunitaire induite est humorale (lymphocytes B) et cellulaire (lymphocytes T)
Vaccins à protéines recombinantesUne protéine recombinante est produite par une cellule (comme une bactérie, une plante, une cellule de mammifère ou encore d’insecte) servant « d’usine vivante » dont le matériel génétique a été modifié avec une séquence de gènes permettant de produire cette protéine ou plusieurs protéines s’assemblant en particules pseudo-virales. Celles-ci sont purifiées et incluses dans le vaccin, qui permettra d’induire une immunité contre le pathogène d’origine de la séquence de gènes
Vaccins à vecteur viralLe vecteur viral est un virus inoffensif pour l’humain qui contient le code génétique d’une protéine d’intérêtUne fois absorbé par les cellules, le code génétique permet de fabriquer la protéine qui va stimuler le système immunitaireLa réponse immunitaire induite est humorale (lymphocytes B) et cellulaire (lymphocytes T)
Comparaison des caractéristiques de la réponse primaire et des caractéristiques de la réponse secondaire aux vaccins inactivés
CaractéristiquesRéponse primaire(1er contact avec l’antigène)Réponse secondaire(contacts ultérieurs avec l’antigène)
Période de latencePériode relativement longue avant l’apparition des anticorps spécifiquesPériode de latence plus courte avant l’apparition des anticorps spécifiques
Intensité de la réactionIntensité faible (habituellement insuffisante pour conférer une protection)Intensité plus forte (habituellement suffisante pour conférer une protection)
Avidité des anticorpsFaible avidité des anticorpsForte avidité des anticorps
Durée des anticorpsDurée courteDurée longue
 SCHÉMA DE LA RÉPONSE IMMUNITAIRE INDUITE PAR UN VACCIN INACTIVÉ

Présence d’un adjuvant

Les adjuvants peuvent être utilisés pour plusieurs raisons :

  • Obtenir une meilleure réponse sérologique.
  • Renforcer l’immunogénicité du vaccin en favorisant la réaction inflammatoire.
  • Assurer une immunité plus durable.
  • Utiliser une quantité plus faible d’antigènes.
  • Administrer un plus petit nombre de doses.

L’adjuvant le plus fréquemment utilisé est le sel d’aluminium, en général sous forme de phosphate ou d’hydroxyde d’aluminium. Les autres adjuvants utilisés sont :

  • Émulsion huile-eau MF59.
  • AS01B (Fraction de Quillaja saponaria Molina et 3-O-désacyl-4’— monophosphoryl lipide A).
  • Adjuvant AS03 (Polysorbate 80, tocophérol et squalène).
  • Adjuvant AS04 (hydroxyde d’aluminium et 3‑O‑désacyl‑4’— monophosphoryl lipide A).

Voie d’administration

La voie ID est la plus immunogène en raison de la grande quantité de cellules présentatrices d’antigènes (ex. : cellules dendritiques et macrophages) présentes dans le derme.On observe une faible immunogénicité dans le tissu adipeux, car les cellules dendritiques y sont rares. Ainsi, la faible immunogénicité observée lorsque le vaccin HB est administré dans la fesse est probablement due à l’injection du vaccin dans le tissu adipeux plutôt que dans le muscle.

Posologie

Généralement, lorsque la quantité d’antigènes contenus dans un vaccin est plus élevée, la quantité d’anticorps augmente.

Nombre de doses

La réponse secondaire observée a tendance à augmenter avec le nombre de doses de vaccin administrées si les intervalles minimaux entre les doses de vaccin sont respectés.

Intervalles entre les doses

Une 2e stimulation antigénique trop rapprochée de la 1re peut être inefficace à cause de l’élimination de l’antigène par les anticorps sériques encore présents à une forte concentration, d’où l’importance de respecter les intervalles minimaux entre les doses.

Mécanismes de protection conférée par certains vaccins

Selon leur type, les vaccins peuvent induire des anticorps et des lymphocytes T, qui sont considérés comme des mécanismes essentiels de protection. Ces mécanismes sont présentés dans les tableaux qui suivent.Il est à noter que les lymphocytes T CD4+ participent à l’induction de toutes les réponses en anticorps, à l’exception de celles qui sont induites par les vaccins polysaccharidiques.Les tableaux ci‑dessous montrent les types de cellules, d'anticorps ou de lymphocytes induits par différents vaccins.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins vivants atténués
VaccinsMécanismes
Poliomyélite
(vaccin oral)
Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Anticorps neutralisants muqueux IgG (++) et IgA (++)
Rougeole, rubéole, oreillonsAnticorps neutralisants sériques IgG (+++)
Lymphocytes T CD8+ (rougeole)
VaricelleAnticorps neutralisants sériques IgG (++)
Lymphocytes T CD4+ (+?)
Fièvre jauneAnticorps neutralisants sériques IgG (+++)
Tuberculose (BCG)Lymphocytes T CD4+ (++)
Grippe (intranasal)Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Anticorps neutralisants muqueux IgG (+) et IgA (+)
Lymphocytes T CD8+ (+)
RotavirusAnticorps neutralisants sériques IgG (+)
Anticorps neutralisants muqueux IgG (+) et IgA (++)
ZonaLymphocytes T CD4+ (++)

Adapté de J. GAUDELUS, Vaccinologie, p. 2. et de Vaccines, 2018, page 17.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés entiers
VaccinsMécanismes
Coqueluche
(vaccin entier)
Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Lymphocytes T CD4+ (+?)
Poliomyélite
(vaccin inactivé)
Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Anticorps muqueux IgG (+)
Hépatite AAnticorps neutralisants sériques IgG (+++)
RageAnticorps neutralisants sériques IgG (++)

Adapté de J. GAUDELUS, Vaccinologie, p. 2. et de Vaccines, 2018, page 17.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés à protéines purifiées
VaccinsMécanismes
Coqueluche
(vaccin acellulaire)
Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Lymphocytes T CD4+ (+?)
Grippe
(vaccin injectable)
Anticorps neutralisants sériques IgG (++)
Anticorps neutralisants muqueux IgG (+)
Tétanos
Diphtérie
Anticorps neutralisants sériques IgG (+++)

Adapté de J. GAUDELUS, Vaccinologie, p. 2. et de Vaccines, 2018, page 17.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés polysaccharidiques
VaccinsMécanismes
PneumocoqueAnticorps neutralisants sériques IgG T-indépendants (++)
Anticorps neutralisants muqueux IgG (+)

Adapté de J. GAUDELUS, Vaccinologie, p. 2. et de Vaccines, 2018, page 17.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés conjugués
VaccinsMécanismes
Hæmophilus influenzæ de type b
Pneumocoque
Méningocoque
Anticorps neutralisants sériques IgG (+++)
Anticorps muqueux IgG (++)

Adapté de J. GAUDELUS, Vaccinologie, p. 2. et de Vaccines, 2018, page 17.

Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés à ARN messager
VaccinsMécanismes
COVID-19 ARNmAnticorps neutralisants sériques IgG
Lymphocytes T CD4+ (++) et T CD8+ (+)
Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés à protéines recombinantes
VaccinsMécanismes
Hépatite BAnticorps neutralisants sériques IgG (++)
VPHAnticorps neutralisants sériques IgG anti-VPH
Zona (sous-unitaire)Anticorps neutralisants sériques IgG contre la glycoprotéine E du virus varicelle‑zonaGénération de lymphocytes T CD4+ contre la glycoprotéine E du virus varicelle‑zona
Mécanismes essentiels de protection conférée par les vaccins inactivés à vecteur viral
VaccinsMécanismes
COVID-19 VVAnticorps neutralisants sériques IgG

Facteurs liés à l’hôte

De nombreux facteurs liés à l’hôte peuvent moduler la réponse immunitaire.

Âge au moment de la vaccination

Le système immunitaire du corps humain est fonctionnel dès la naissance et persiste tout au long de la vie. Des différences dans la réponse immunitaire existent selon l’âge, particulièrement chez les très jeunes enfants et les personnes âgées.

NOUVEAU-NÉS PRÉMATURÉS

La réponse immunitaire dépend de l’âge après la naissance, et non de l’âge gestationnel. Ainsi, un bébé né à 30 semaines de grossesse recevra ses premiers vaccins quand il atteindra l’âge de 2 mois, même si cet âge correspond à un âge gestationnel de 38 semaines.

NOUVEAU-NÉS ET NOURRISSONS ÂGÉS DE MOINS DE 2 ANS

La capacité du système immunitaire des enfants âgés de moins de 2 ans est très importante :

  • Nombre élevé de lymphocytes naïfs disponibles.
  • Capacité de générer jusqu’à 2 millions de lymphocytes T CD4+ chaque jour.
  • Capacité de répondre à 10 000 antigènes différents simultanément.

Leur système immunitaire est immature :

  • Forte proportion de lymphocytes B et T immatures.
  • Centres germinatifs non encore présents dans les tissus lymphoïdes.
  • Présence d’une réponse immunitaire aux antigènes T‑dépendants, mais production d’anticorps moindre que chez les enfants plus âgés.
  • Absence de réponse immunitaire aux antigènes T‑indépendants, d’où l’absence de réponse ou la faible réponse aux vaccins polysaccharidiques.

Les anticorps de la mère sont présents chez les nouveau‑nés :

  • Ils sont transmis passivement in utero ou par l’allaitement.
  • Ils peuvent avoir un effet inhibiteur sur la réponse immunitaire du nourrisson; les calendriers de vaccination en tiennent compte.
  • Ils protègent partiellement contre la varicelle, la poliomyélite, la rougeole, les oreillons, la rubéole, la gastroentérite à rotavirus, le tétanos, la diphtérie, la coqueluche et l’infection invasive à Hæmophilus influenzæ de type b.
SCHÉMA DE LA RÉPONSE HUMORALE CHEZ LE NOURRISSON

Source : Jean-Pierre REGNAULT, Immunologie générale.

ADOLESCENTS

En général, cette période d’âge est celle où le système immunitaire répond le mieux.

PERSONNES ÂGÉES

La capacité d’obtenir une bonne réponse immunitaire s’atténue au cours du vieillissement, car le pool des plasmocytes non différenciés diminue avec le temps.

Facteurs génétiques

Les déterminants génétiques, tels que le système sanguin ABO et les antigènes d’histocompatibilité HLA, jouent un rôle dans l’immunité adaptative.Certaines personnes répondent mieux que d’autres aux vaccins. Par exemple, certaines personnes ne développent pas d’anticorps à la suite de la vaccination contre l’hépatite B, mais développent une réponse cellulaire qui assure leur protection.

Immunodépression

Qu’elle soit acquise ou congénitale, l’immunodépression diminue généralement la réponse immunitaire humorale ou la réponse immunitaire cellulaire, ou les deux.

Malnutrition

La malnutrition est associée à une altération de la fonction de la barrière intestinale et à un faible niveau des protéines du complément.Le tissu lymphatique, en particulier le thymus, subit une atrophie, et les réponses d'hypersensibilité de type retardé sont réduites.Les niveaux d'anticorps produits après la vaccination sont réduits chez les personnes gravement malnutries.

Obésité

L’obésité est associée à des troubles métaboliques qui provoquent un dysfonctionnement tissulaire dans le tissu adipeux, le foie, le pancréas et les vaisseaux sanguins.Ces changements sont associés à un impact négatif sur l’immunité contre l’infection et sur l’efficacité vaccinale.Dernière mise à jour : 16 avril 2021 

Le vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons et les troubles envahissants du développement : Une simple hypothèse

Copyright and License information PMC DisclaimerThis article is also available in English. See "Measles-mumps-rubella vaccine and autistic spectrum disorder: A hypothesis only".


En 1998, Andrew Wakefield et ses collaborateurs (1) ont publié un rapport dans lequel ils avançaient l’hypothèse selon laquelle l’administration du vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons (vaccin RRO) aux jeunes enfants précipitait l’apparition d’une maladie inflammatoire de l’intestin pouvant provoquer l’autisme. Les mécanismes qui, selon eux, déclenchaient le processus morbide, s’établissaient comme suit : le vaccin RRO pourrait produire une hyperplasie lymphoïdonodulaire iléale, une colite non spécifique; cette colite peut activer soit une malabsorption de vitamines ou de micronutriments, soit une augmentation de la perméabilité intestinale aux protéines, ce qui finit par susciter la formation d’auto-anticorps néfastes aux tissus cérébraux ou à d’autres organes. D’après les auteurs, ces mécanismes provoqueraient ensuite l’apparition de l’autisme. Cette hypothèse se fondait sur l’étude de cas d’une série de neuf enfants atteints d’une maladie inflammatoire de l’intestin et d’autisme ayant été immunisés par le vaccin RRO. Trois autres enfants non autistiques présentant des troubles de comportement étaient également inclus dans l’étude. Depuis la publication du rapport de Wakefield et de ses collaborateurs (1), une importante controverse a germé au sein du milieu médical, de la presse non spécialisée, du grand public et du congrès américain.L’association entre le vaccin RRO, les maladies inflammatoires de l’intestin et l’autisme décrite par Wakefield et ses collaborateurs (1) pourrait être accidentelle, causale ou provenir d’une interaction avec un autre événement inconnu. Pour établir si un lien est probablement causal, les critères suivants sont généralement évalués : la puissance de l’association, la cohérence des études menées auprès de diverses populations et par divers investigateurs, la spécificité, la temporalité ou non des événements après l’exposition, le gradient biologique, la plausibilité (bien que son absence n’écarte pas la possibilité d’un lien causal), la cohérence, les preuves expérimentales de soutien et, enfin, l’analogie avec d’autres maladies (2).La causalité ne pouvait être démontrée dans le rapport de Wakefield et de ses collaborateurs (1) en raison du petit nombre d’enfants à l’étude, des préjugés de sélection d’une clinique de gastro-entérologie hautement spécialisée, de la mémoire défaillante des parents quant au moment de l’apparition des symptômes et de l’absence de groupe témoin. Un rapport ultérieur de Wakefield et de ses collaborateurs (2), portant sur d’autres enfants atteints comparés à un groupe témoin, comportait également plusieurs failles méthodologiques qui empêchaient une association causale (3).Depuis la diffusion du premier rapport de Wakefield et de ses collaborateurs (1), plusieurs études ont été publiées sur l’existence du mérite scientifique de l’association hypothétique entre le vaccin RRO et l’autisme.

  • Le conseil national de la santé et l’institut national de la santé publique de Finlande (4) ont examiné des données colligées pendant 14 ans sur les effets néfastes du vaccin RRO administré à 1,8 million d’enfants (soit environ trois millions de doses de vaccin) et n’ont trouvé aucun cas semblable à ceux qu’avaient décrits Wakefield et ses collaborateurs (1).
  • Taylor et ses collaborateurs (5) ont examiné 498 cas d’autisme chez des enfants nés depuis 1979 et n’ont pas trouvé de lien épidémiologique avec l’administration du vaccin RRO. Plus précisément, ils n’ont remarqué aucune augmentation brusque de diagnostic d’autisme ou de modification importante aux tendances de diagnostic d’autisme depuis l’implantation et l’adoption du vaccin RRO dans le calendrier de vaccination universel. De plus, l’âge de diagnostic demeurait le même chez les enfants qui n’avaient jamais été vaccinés, ceux qui avaient été vaccinés avant l’âge de 18 mois et ceux qui avaient été vaccinés après cet âge. Les auteurs n’ont observé aucune association temporelle entre l’apparition de l’autisme et l’administration du vaccin. Ils n’ont remarqué aucune grappe de régression du développement dans les mois suivant l’administration du vaccin RRO chez les enfants diagnostiqués comme autistiques.
  • Deux études, l’une menée en Angleterre (6) et l’autre, en Californie (7), portaient sur les tendances d’augmentation des cas déclarés d’autisme en association avec des modifications à la couverture du vaccin RRO et n’ont fait état d’aucune différence dans la couverture vaccinale en association avec une augmentation rapide des diagnostics d’autisme. Dans l’étude britannique, les taux déclarés d’autisme sont passés de 0,3 cas pour 10 000 habitants-année en 1988 à 2,1 cas pour 10 000 habitants-année en 1999, tandis que le taux de vaccin RRO demeurait stable, à 95 % tout au long de l’intervalle observé (6). Dans l’étude californienne, la signalisation des cas d’autisme est passée de 44 cas pour 100 000 naissances vivantes en 1980 à 208 cas pour 100 000 naissances vivantes en 1994 (7), ce qui représente une augmentation relative de 373 % du taux de cas d’autisme déclarés. Par contre, le taux d’immunisation au vaccin RRO à 24 mois est passé de 72 % à 82 % au cours de la même période, ce qui représente une augmentation relative de seulement 14 %. Bref, un examen des données disponibles en Grande-Bretagne et en Californie ne démontre pas de corrélation entre les tendances séculaires de couverture au vaccin RRO dans la petite enfance et la prévalence de l’autisme. Une absence de corrélation similaire a été relatée en Suède, où le taux de prévalence d’autisme n’a pas changé après l’implantation de l’immunisation au vaccin RRO (8).

L’incidence d’enfants recevant un diagnostic d’autisme ou de trouble envahissant du développement a connu une augmentation apparente considérable au cours des dix dernières années (6,7,9). Les adeptes de la théorie selon laquelle le vaccin RRO est responsable de l’autisme considèrent cette augmentation apparente comme une preuve à l’appui de la validité de leur théorie. Les raisons de cette augmentation apparente de diagnostics d’autisme ne sont pas tout à fait claires. Les spécialistes du développement de l’enfant pensent que les deux principaux facteurs reliés à cette augmentation sont une plus grande sensibilisation à ce trouble et la libéralisation des critères diagnostiques de cette maladie au début des années 1990 (9,10). L’utilisation du diagnostic de troubles envahissants du développement plutôt que d’autisme entraîne l’inclusion de beaucoup plus d’enfants, ce qui accroît de manière considérable les taux déclarés de la maladie. Cependant, il n’existe pas assez de données pour exclure la possibilité d’une augmentation véritable de ce trouble ou de la corrélation de certains cas à des modifications environnementales. L’une des difficultés repose sur l’absence de marqueur biologique pour poser un diagnostic. En effet, le diagnostic d’autisme est posé d’après l’anamnèse et l’examen physique conjugués à un ou plusieurs outils de dépistage et critères diagnostiques (11). De même, environ le tiers des enfants autistiques présente une régression des phases du développement ou des aptitudes. Malheureusement, il n’existe aucune définition standardisée de cette variante, qui est justement associée au vaccin RRO.Plusieurs autres organisations ont examiné l’association entre le vaccin RRO et l’autisme. En 1998, le Medical Research Council du Royaume-Uni a évalué les données disponibles et a découvert que les observations étaient insuffisantes pour étayer une association entre le vaccin RRO et l’autisme (12). En avril 2001, un examen qui incluait des renseignements plus récents a été publié dans le Relevé des maladies transmissibles au Canada (13), et les auteurs sont parvenus à la même conclusion que le Medical Research Council du Royaume-Uni. Enfin, le rapport de la New Challenges in Childhood Immunizations Conference, qui a eu lieu à Oak Brook, en Illinois, les 12 et 13 juin 2000, et qui approfondissait la question, a été publié en mai 2001 (14). La conférence, qui passait en revue toutes les données disponibles publiées et non publiées à ce sujet, concluait également que les données disponibles n’appuient pas l’hypothèse selon laquelle le vaccin RRO cause l’autisme, des maladies connexes ou les MII (maladies inflammatoires de l’intestin).Go to:

LES RECOMMANDATIONS

  • La Société canadienne de pédiatrie (SCP) appuie les conclusions d’autres groupes indiquant que les données obtenues à l’échelle internationale jusqu’à maintenant n’étayent pas d’association entre le vaccin RRO et l’apparition de l’autisme.
  • La SCP appuie le maintien du recours universel au vaccin RRO combiné pour les enfants canadiens. Rien ne démontre les bienfaits de l’administration distincte des vaccins contre la rougeole, la rubéole et les oreillons et, par conséquent, un tel mode de vaccination entraînerait une augmentation inutile du nombre d’injections que recevraient les enfants et une augmentation de la possibilité de rater ou de retarder des vaccins.
  • La SCP fait valoir et soutient des études scientifiques bien conçues afin de garantir l’innocuité du vaccin RRO et des autres vaccins.
  • La SCP favorise des études scientifiques fondamentales et épidémiologiques ciblées accompagnées d’une analyse rigoureuse des données pour déterminer les causes de l’autisme, en améliorer la prise en charge et élaborer des stratégies de prévention.
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